52.
Ce soir-là, Will roula jusqu’à Manhattan et poussa une pointe à plus de 170 sur la Saw Mill River Parkway. Ah, quelle soirée ! Il était vraiment trop doué ! Mais il restait sur sa faim et avait une furieuse envie de baiser. Combien de temps supporterait-il encore de jouer les soupirants romantiques ? Il n’avait guère l’habitude de fournir ce genre de prestation.
Maggie était à l’image de ses chansons, honnête et sans artifices, mais il commençait à se demander si le jeu en valait vraiment la chandelle. Dieu qu’il lui était pénible d’avoir à se montrer si gentil en permanence ! Parfois, il avait même le sentiment que devenir assez bien pour Maggie Bradford relevait de la mission impossible.
C’est le chat et la souris, songea-t-il en franchissant le pont séparant le comté de Westchester de Manhattan. Avec les femmes, il n’en allait pas autrement. Il les attrapait presque toujours, certaines lui donnaient simplement un peu plus de mal que d’autres. Il s’agissait d’un sport, ni plus ni moins, un palliatif du football, un palliatif de tout ce que le football lui-même servait à compenser…
Marchand d’art, Rebecca Post possédait un immense appartement sur la Soixante et unième Rue Est. De ses fenêtres, elle voyait le pont. Rebecca était une petite souris très facile, trop facile à attraper, mais il trouverait bien une idée pour pimenter un peu la partie. Pas de problème.
Will pénétra sans difficulté dans le luxueux appartement. Il en possédait en effet la clé. Il lui avait suffi de la demander.
Une fois dans les lieux, il progressa sur la pointe des pieds. Il se faisait l’effet d’un cambrioleur. Dans le salon, une pendule digitale indiquait 1 h 20 du matin.
S’imaginer dans la peau d’un monte-en-l’air lui plaisait beaucoup. N’était-il pas un spécialiste de l’effraction ? Car c’était bien par effraction qu’il pénétrait dans la vie de tant de femmes. Et ses intrusions ne semblaient pas leur déplaire…
Le loup-garou de Londres, Paris, Francfort, Rome et Rio avait élu domicile à New York. Ainsi allait la vie.
Il jeta un coup d’œil dans la chambre à coucher et aperçut Rebecca qui dormait nue au-dessus des draps, confortablement lovée dans une pose très suggestive. Ses longs cheveux auburn ruisselaient sur l’oreiller. Elle était superbe et extrêmement désirable.
Will savait parfaitement ce qu’il voulait faire : la violer sans prononcer le moindre mot, puis s’en aller.
Et c’est exactement ce qu’il fit, conformément à ses désirs.
Pour la Flèche d’or, comme toujours, l’amour n’était qu’un jeu. Il fallait un gagnant et un perdant.